la comedie inhumaine

humeur culturelle.

mercredi, janvier 11, 2006

OLIVA OLIVA, CONTE D'HOFFMANN (3.25+)

Je n'ai rien contre télérama mais heureusement que je n'ai pas lu la critique qui y est parue à propos du film "oliva oliva" de peter hoffmann avant de décider d'aller le voir car cela m'aurait privé d'un grand film très original. Vous pouvez lire cet article sur le site télérama.fr
Autant vous dire que je ne suis pas du tout d'accord avec télérama.
Remarquez, c'est déja mieux que les inrocks qui n'en ont pas du tout parlé.
A leur décharge on reconnaîtra qu'il est difficile de faire un papier sur chacun des dix-sept films (un record) qui sortent ce mercredi 11 janvier 2006.
C'est peut-être à ça que sert un blog, faire connaître des oeuvres qui échappent au traitement des grands médias.
Alors qu'est-ce que c'est que ce film et en quoi justifie-t-il d'être le premier article de mon premier blog?
Il s'agit tout d'abord d'un film qui est diffusé en 2e partie d'une des plus grandes oeuvres cinématographiques de tous les temps: "terre sans pain" de luis bunuel donc rien que pour cela il faut courir voir ce film.
Ensuite c'est un documentaire hors norme à de nombreux points de vue.
D'abord par sa durée: 1h 10, puis par son format:mélange de photos noir et blanc et de film super 8 dont la teinte sépia accentue encore l'étrangeté intemporelle, par son traitement sonore ensuite (prix du meilleur son au festival documentaire de marseille qu'il a également remporté) qui mélange une "voix off" introspective omniprésente et des sons resynchronisés avec précision, d'une beauté encore grandie par leur rareté.
D'histoire il n'y en a pas vraiment dans ce film
sur l'absence, le vide, le rien mais ce n'est pas important. Souvent même la voix nous décrit des évènements que l'objectif n'a pas saisi et c'est encore plus beau que si nos yeux les avaient vu.
Des apiculteurs dans une région aride du sud-ouest de l'espagne, leur entreprise va être fermée par l'état. Ils sont comme un écho à ceux du film de bunuel dont on voyait l'âne mourir sous les attaques de milliers d'abeilles.
Ici comme un symbole peter hoffmann le réalisateur-narrateur sera piqué à l'oeil pendant qu'il tourne. Proche des journaux intimes de jonas mekas , ce film nous entraine dans l'introspection la plus abstraite nous plongeant souvent dans le noir, au propre comme au figuré.
Le point de départdu projet c'est filmer le travail des hommes au milieu des abeilles et la récolte du miel. Le résultat est très différent, c'est un documentaire sur le film en train de se faire ou plutôt de se défaire, avec ses échecs, ses fausses pistes, ses pannes, ses doutes mais sans le côté mise en abyme souvent raté au cinéma sauf chez maître kiarostami.
Les apiculteurs travaillent avec des moyens aussi artisanaux et dépassés que les outils du cinéaste qui les filme en super 8 à l'époque de la caméra HD et du tout numérique. Cet accord de la forme et du fond contribue à la grande réussite de cette oeuvre qui ne tombe jamais dans la pose ou le maniérisme malgré une voix off parfois un peu pesante.
A la fin du film on aura pas appris grand chose sur la récolte du miel ni sur les moeurs des abeilles, car au fond ce n'est pas ce qui intéresse hoffmann, mais on aura été plongé dans un véritable poème visuel, équivalent filmé du folk lo-fi d'un "smog" ou d'une "cat power".Un film sur le temps qui passe et qui détruit tout sauf le souvenir.
On pense bien sûr à l'épopée du kon-tiki chère à andré bazin devant ce documentaire impossible qui est sans le vouloir le premier grand film de 2006.

Lien vers la bande-annonce sur allociné:
http://www.allocine.fr/film/video_gen_cfilm=109237.html